Jean Louis Gouraud : Les hommes ont déjà beaucoup de mal à définir de façon précise en quoi consiste leur propre bien-être. On doit donc faire preuve d’une certaine retenue dans nos affirmations relatives au bien-être animal. On peut toutefois, en ne s’en tenant qu’à des données objectives, se rapprocher de ce qui est probablement le bien-être d’un cheval en assurant la satisfaction de ses besoins fondamentaux concernant la nourriture, le logement, l’environnement.
Une discipline nous a permis de faire de grands progrès dans l’identification de ces besoins : c’est l’éthologie. Cela consiste à observer le comportement d’un animal, en l’occurrence le cheval, en liberté. L’observation attentive de son comportement permet en effet de mieux identifier ses besoins, disons, « naturels ».w
Jean Louis Gouraud : Il y a deux questions dans cette question.
Ce que je pense de l’équitation éthologique ? Plus il y a de l’éthologie dans l’équitation, mieux ça vaut ! Plus on connaît son compagnon de travail ou de jeu, plus on augmente les chances d’avoir avec lui un rapport qui lui plaît, et donc le résultat qu’on en attend.
En ce qui concerne l’impact de cette équitation dite éthologique dans la société, elle est énorme. Elle a ramené au cheval et à l’équitation beaucoup de gens, garçons ou filles, qui s’en étaient éloignés par dégoût pour les méthodes utilisées dans certains clubs où l’initiation à l’équitation consistait à subir des heures de tape cul sur de pauvres chevaux abrutis par la routine et même, parfois, la fatigue.
Jean Louis Gouraud : Voilà cinq ou six mille ans que le cheval vient en aide aux hommes dans tous les domaines, toutes les activités, toutes les aventures. On a cru, lorsqu’on a inventé le moteur, que la mécanisation remplacerait le cheval. Elle ne l’a remplacé que pour les travaux de force, mais on lui a vite trouvé d’autres avantages, d’autres usages, dans le sport, les jeux, les loisirs, les arts. Et, depuis peu, dans certaines thérapies.
Dans mon petit livre, j’insiste sur une nouvelle aide que le cheval peut apporter aux hommes : faciliter notre reconnexion au monde, à la nature. C’est une aide « nouvelle » dans la mesure où le besoin de nature qu’éprouvent ces mammifères bipèdes que sont les Hommes étaient moins pressants lorsque 80% d’entre eux vivaient à la campagne. Or c’est aujourd’hui l’inverse. 80% des hommes vivent en ville, enfermés, confinés, urbanisés : au secours. Les chevaux peuvent nous aider à renouer avec le monde réel, le monde vivant.
Jean Louis Gouraud : Je ne vois pas bien l’influence du digital sur les métiers du cheval, si ce n’est en profitant du progrès que le digital offre ou offrira dans les domaines vétérinaires ou autres. Le digital n’est l’ennemi du cheval que lorsqu’il enferme les hommes dans des réseaux sociaux qui portent mal leur nom. Car ces réseaux, loin de développer les relations sociales, ont plutôt pour conséquence d’isoler les individus, d’aggraver l’enfermement sur soi, de nous éloigner du monde réel, du monde vivant.
Jean Louis Gouraud : C’est en tout cas ce que je cherche à dire dans mon petit livre. Les campagnes animalistes qui préconisent qu’on cesse d’employer des chevaux pour quelque activité que ce soit, ne sont pas mal intentionnées. Elles partent, au contraire, d’un bon sentiment : il ne faut pas embêter les bêtes ! On est d’accord. Mais croire que le « bonheur » d’un animal est dans l’inaction est une erreur totale, due à une ignorance de l’animal. Il faut donc, bien sûr, éduquer, partager ses connaissances pour convaincre que non. Le travail n’est pas nécessairement pour le cheval, pas plus que pour l’homme, un esclavage. Cela peut être au contraire une libération, un plaisir, un soulagement. Le travail, j’en suis persuadé, fait partie du bien-être du cheval.
Propos recueillis le 12 mars 2021.
Qui peut encore faire le lien entre l’Homme et la nature ? Sûrement pas les robots ! Le cri d’alarme que lance Jean Louis Gouraud n’est pas une simple récrimination contre l’idéologie qui sous tend l’action, parfois violente, de ceux qui recommandant le non emploi du cheval. C’est aussi, et surtout, un rappel de vérités fondamentales qui construisent la relation de l’Homme à l’animal depuis des temps immémoriaux . L’auteur de ce court manifeste le proclame, loin d’être un animal fini, démodé, condamné, “le cheval, c’est l’avenir” !
80 pages – 10×19 cm – 8€
Disponible sur notre site internet et en boutique au Haras.
Interview exclusive de Jean Louis Gouraud pour son livre “Le cheval c’est l’avenir”.